La France, qui prend la présidence du G20 dans quelques jours, souhaite en priorité, promouvoir la stabilité du système monétaire international, et coordonner les taux de change. Pour ce faire, elle est en droit d’espérer une plus forte coopération de l’Union Européenne et des Etats Unis, alors qu’elle tente d’inciter la Chine à participer à cet effort. Chacun sait que la Chine, qui sous-évalue délibérément le Yuan afin de booster ses exportations, est le pays qu’il faut convaincre de changer. Or les critiques publiques de la Commission européenne concernant le taux de la monnaie chinoise ainsi que les déclarations du Trésor américain demandant à la Chine de réévaluer sa monnaie, ont été faites trop publiquement pour avoir de l’effet, ne lui fournissant pas de moyen de sauver la face.
La justesse de l’initiative française
En revanche, l’initiative du gouvernement Sarkozy de commencer un dialogue privé avec la Chine en amont de la présidence du G 20, avec l’objectif d’atteindre rapidement un consensus parallèlement aux négociations officielles, entre dans une certaine logique qui tient compte des susceptibilités chinoises.
« Nous n’avons pas une seule plateforme mondiale où nous pouvons résoudre les questions monétaires internationales, déclarait le Président français lors de la réunion Asie Europe, début octobre. Chacun fait ce qu’il veut chacun de son côté et essaie de préserver sa souveraineté.»
Eviter la guerre des monnaies
La France ne propose pas de fixer les taux mais elle souhaite ouvrir le débat dès novembre, désireuse d’empêcher une guerre des monnaies. Personne ni aucun pays n’a intérêt à voir ressurgir la politique d’appauvrissement de son voisin qui a prévalu pendant la grande dépression de 1930 et au cours de laquelle on vit une course à la baisse des taux monétaires glisser dangereusement vers une politique que les anglo-saxons ont nommée, à l’époque« Beggar thy neighbour ».
Or, depuis la crise de 2007, on observe que chaque pays a pris des mesures pour protéger la santé de son propre secteur financier plutôt que de faire adopter un ordre mondial qui éviterait d’autres crises. D’autant plus que nous risquons de rechuter dans une nouvelle crise financière si les Etats ne peuvent sortir de leur crise liée à leur niveau d’endettement.
C’est surtout une crise de confiance majeure qui se profile si les leaders politiques ne montrent pas une cohésion réelle et une meilleure compréhension des solutions susceptibles de corriger les déséquilibres structurels de l’économie mondiale.
Responsabiliser la Chine est une tache difficile mais prioritaire
Le G20 réussira-t-il sous la présidence française là où les autres politiques ont échoué ? Cela dépend entièrement de la réponse de la Chine qui, jusque là, a été mitigée : « Ne mettez pas la pression sur le taux du renminbi, cela déclencheraient des agitations sociales en Chine» a prévenu le leader Chinois Hu Jintao à Bruxelles le 7 octobre dernier qui n’a jusqu'à présent accepté qu’une très légère hausse du renminbi. Ce n’est pas suffisant lorsque l’on sait que certains experts parlent de la nécessité d’une réévaluation de 40 %.
Il est choquant d’entendre le leader chinois parler de risque d’émeutes dans son pays si les exportations chinoises venaient à se ralentir, Que dire des désordres sociaux actuels en Europe qui sont directement liés à ce déséquilibre ? Le ralentissement de la croissance et les crises déficitaires sont les conséquences directes de la surévaluation de certaines monnaies, surtout du Yuan. Ces facteurs peuvent mener directement à une crise dans les pays déficitaires qui ont encouragé le niveau d’endettement du secteur immobilier. En d’autres termes, en prêtant leur surplus, les Chinois continuent d’alimenter un niveau de consommation insoutenable à moyen terme dans nos économies. D’autant que, suite à la crise, ce premier endettement du secteur privé, a été remplacé par une crise structurelle liée aux déficits budgétaires.
Les espoirs de voir changer la Chine ne sont pas vains
Apres vingt ans de croissance débridée, il est clair que l’intérêt des Chinois est de commencer à privilégier la consommation intérieure. Avec un revenu par habitant d’un dix-huitième de celui de la population américaine, et 200 millions d’habitants vivant en dessous du seuil de pauvreté, un comble pour un pays qui se dit encore communiste, la Chine pourrait réviser ses orientations en mettant l’accent sur une stimulation de la consommation intérieure afin de réduire l’écart grandissant entre les riches et les pauvres. Une telle évolution serait enfin favorable aux économies occidentales qui pourraient trouver dans le marché intérieur chinois, un terrain d’exportation qui boosterait leur croissance et leur économie. .On peut aussi espérer que le plan quinquennal du Congrès National Chinois qui vient de se réunir milieu Octobre, donnera cette impulsion nécessaire au marché intérieur chinois ainsi que des orientations claires sur la politique monétaire des prochaines années. Une promesse de rééquilibrage économique pour l’Occident ?
par
Brigitte Ades
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